Le Ski club de Sainte-Croix qui s’occupe de la piste éclairée, gère également le traçage des pistes de ski de fond reliant le Col des Étroits à la Gittaz. Nous sommes partis à la découverte de ce domaine à bord de la Kässbohrer Pisten Bully 100, avec son chef dameur Kim Fiaux.
Ce mercredi matin de janvier, il fait encore nuit quand nous quittons le bas de la piste éclairée où est entreposée la dameuse du ski club. Le vrombissement et les lumières de cette dernière font concurrence aux saleuses qui parcourent le village encore à moitié endormi. « Quand la machine est froide, je préfère faire le tour au lieu de monter tout droit », explique Kim Fiaux qui entame sa troisième saison comme responsable du damage.
Arrivé en haut, Sainte-Croix s’offre à nous avec ses toitures enneigées et les lueurs orange des lampadaires. En arrière-plan, on aperçoit les lumières de la plaine, puis le contour des Alpes qui se dessine à peine. On quitte la piste éclairée pour reculer jusqu’aux maisons du Mont-des-Cerfs avant de repartir en laissant les marques du traceur derrière nous.
Le départ des pistes de fond cohabite avec celui du sentier raquettes, et même si leurs chemins se séparent un peu plus loin, cela pose quelques problèmes. « Quand ils arrivent à l’intersection, au lieu de partir sur le chemin raquettes, beaucoup de promeneurs continuent sur la piste de fond. Ce sont souvent des personnes qui ont pour habitude d’emprunter ce chemin avec leur chien à la belle saison et qui continuent à le faire en hiver. Comme la piste ne fait pas plus de 1,5 mètre par endroits, la partie skating ne reste donc jamais longtemps intacte et c’est bien dommage pour les skieurs », déplore le chef dameur.
Skier à travers les sapins…
À peine sorti du premier bosquet, le vent souffle fort, à tel point que les sapins ont perdu leur manteau blanc et de grosses congères se sont formées sur la piste, pourtant damée la veille. « Le plateau de la Gittaz est très exposé, quand on repassera au retour, les traces auront sûrement déjà disparu » explique Kim.
Le damage de ces pistes se fait généralement le mercredi et durant le week-end. Quatre dameurs se relayent pour effectuer ce travail bénévolement. Leur responsable qui nous sert de guide, garde un lien serré avec le ski club de Sainte-Croix. En effet, cet ingénieur en gestion de la nature a grandi au bas de la piste éclairée et allait aider à son entretien durant son temps libre. Quand il est revenu dans la région après ses études, c’était évident pour lui d’intégrer le Ski club. « Je peux coordonner cette activité facilement avec mon emploi pour lequel j’effectue plus d’heures en été, que je reprends pour le damage en hiver », précise le jeune homme de vingt-huit ans. La piste se resserre quand, en face de nous, les Aiguilles de Baulmes prennent forme. En descendant dans la forêt, le conducteur arrête fréquemment sa machine pour aller déblayer les branches d’arbres qui ont cédé sous le poids de la neige. Comme tout bon dameur qui se respecte, Kim pratique aussi le ski de fond, surtout depuis qu’il a repris cette activité : « c’est ainsi que l’on se rend compte de ce qu’il faut ou ne faut pas faire ». Par endroits, la dameuse sert de chasse-neige en ramenant l’or blanc là où il y en a besoin. Le chef dameur connaît les pistes comme sa poche et anticipe pour que celles-ci puissent être praticables le plus longtemps possible. Il a été bien formé par son prédécesseur André Pastoris et peut aussi compter sur les conseils de Yan Egger, qui bénéficie d’une bonne expérience dans ce domaine
… dans une nature tranquille
En descendant sur les fermes des Grangettes, le village de L’Auberson semble sortir d’une carte postale. Cette liaison est tracée quand il y a assez de neige et Denis Montandon, qui s’occupe des pistes du côté de L’Auberson, fait de même. En remontant sur les Gittaz, par la Séchaz et la Combette à l’ours, le rose du ciel perce la forêt. Là, les arbres n’ont rien perdu de leurs manteaux blancs et leurs lourdes branches forment des arcs le long du chemin. « C’est un passage tranquille et sauvage que certains skieurs affectionnent et que nous retraçons à nouveau » explique Kim.
Une fois arrivée près de la Gittaz-Dessus, la dameuse fait un détour jusqu’au stade de foot pour refranchir à nouveau la route et passer derrière les maisons de la Gittaz-Dessous. Quand l’on rejoint le plateau pour boucler la boucle, la neige a déjà partiellement recouvert nos traces faites à l’aller… Dans les deniers kilomètres en direction du Mont-des-Cerf, on aperçoit au loin les Alpes qui se dévoilent complètement, alors qu’autour de nous, le soleil vient dorer la cime des sapins.
Il aura fallu presque deux heures pour damer ce tracé de moins de dix kilomètres. Quand nous rejoignons le haut de la piste éclairée, une nouvelle vue s’offre à nous. Au loin, une tranchée lumineuse traverse un ciel couvert et vient se refléter dans le lac de Neuchâtel. Dans cette atmosphère hivernale, Sainte-Croix paraît encore endormi alors qu’il est déjà presque 9 heures. La machine ayant à peine entamé la descente en dévers, qu’elle rejoint son couvert pour un court répit, avant de repartir pour damer la poudreuse de la piste de ski alpin qui sera ouverte l’après-midi même.