En peinture, les sentiers sont un moyen pour donner de la perspective. Le crayon en main, Esther Kiss a fait son chemin. De la Suisse en passant par Latium, région en Italie centrale, la Vaudoise s’immerge dans différents domaines professionnels. Puis, les paysages du Jura la convainquent. Le point focal de son univers devient l’expression artistique.
Aujourd’hui, sa fenêtre donne sur les montagnes et les pâturages. Au loin, le lac. La vue semble être harmonisée comme une composition classique. Fillette à l’École Active, Esther revendique la volonté de « rien faire ». En effet, la bavarde erre dans la cour intérieure et les couloirs, observe la nature et parle avec tout le monde. Sa prétendue inoccupation s’avère un grand besoin d’observer et de communiquer. Régulièrement, elle extériorise son expérience en griffonnant. À 16 ans, les Beaux Arts et les métiers de la terre retiennent son attention. Pourtant, une approche rationnelle de la vie d’adulte la conduit au Conservatoire. « La perspective d’un travail fixe dans l’enseignement de la musique épongeait les insécurités. Ce choix m’a semblé le juste milieu. En revanche, diplôme en poche et poste d’enseignante trouvé, je me suis sentie piégée. »
D’une note à une noisette
Esther envisage alors une formation d’accordage d’accordéon à Castelfidardo, ville en Italie centrale. Elle y rencontre son compagnon de route pour la décennie à venir. Un rêve se réalise. L’instrument de musique cède la place aux outils agricoles. Sur une exploitation de 8 hectares dans la banlieue romaine, elle plante des oliviers et noisetiers. « Le contact avec la nature fut tel qu’un bol d’air frais. Entre la famille, la cueillette et la transformation des produits du terroir, j’ai pris le temps pour approfondir la création artistique ». Au pays de Léonard de Vinci, la richesse du dessin à l’encre l’interpelle. Ses pochettes se remplissent de scènes figuratives imagées, de nus et de vues sur les collines de Latium. « Les monticules du Sud ne sont pas les montagnes helvétiques de ma jeunesse. Après dix ans, j’ai éprouvé le besoin de revenir à mes racines pour me retrouver ». Elle retourne au bercail et élit domicile à Sainte-Croix. Dans sa valise : une centaine d’œuvres, pas de projets concrets mais une détermination de trouver sa voie. Lors de sa réinsertion professionnelle, une exposition rétrospective mais avant tout ses balades dans le Jura la revigorent.
L’environnement paisible avec le lac au loin l’inspire à franchir le pas. Du « je veux peindre », Esther Kiss change son discours en « je vais peindre ».
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