La loi doit encore passer le cap du Grand Conseil, mais selon les projections du Canton, Sainte-Croix devrait tirer son épingle du jeu. Elle pourrait recevoir près d’un demi-million de plus qu’actuellement. Bullet et Mauborget s’en sortent bien également.
« Nous sommes plus rassurés qu’il y a quelques mois concernant les effets pour Sainte-Croix de la nouvelle péréquation intercommunale vaudoise (NPIV) qui nous a été présentée », exprime avec soulagement Cédric Roten, syndic. Il souligne également que le nouveau mécanisme a l’avantage d’être « très clair ». Une simulation de calcul sur la base des chiffres de 2022 laisse apparaître un solde positif de 1,519 millions de francs, soit une augmentation de près de 491’000 francs par rapport au montant actuel que touche la Commune.
De son côté, Maude Schreyer, syndique de Bullet, « salue l’effort entrepris pour mettre en place cette nouvelle péréquation attendue depuis des années ». Elle poursuit : « nous avions un peu d’appréhension avant de prendre connaissance du projet et des chiffres. Maintenant, nous savons plus ou moins ce qui se passera sur le plan financier ». La syndique estime que le système est à l’avantage de la grande majorité des communes et qu’il permet de répartir les ressources de manière nettement plus objective qu’auparavant.
Deux piliers
État des lieux : Après des années de tractations plus ou moins houleuses avec le Canton, les deux associations de communes vaudoises ont validé la dernière mouture du projet conçu par l’État, et la loi va être soumise au Grand Conseil cet automne, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2025, confirme Cédric Roten, également député. Reste une inconnue : le sort de l’initiative SOS Communes, qui demande la reprise par l’État de la totalité de la facture sociale.
Le nouveau système repose sur deux piliers : la péréquation des ressources et celle des besoins structurels. Ses principes visent à atténuer les disparités fiscales dues à de grands écarts de capacité financière des communes d’une part, et à des besoins structurels différents d’autre part.
Sainte-Croix, aux recettes fiscales plutôt modestes (1’475 francs par habitant, revenu fiscal standardisé) est largement en dessous de la moyenne du canton, calculée à 3’270 francs. Grâce au nouveau système, elle va recevoir un versement du pot commun qui comblera l’écart avec les 80 % de la moyenne cantonale. De plus, une prestation appelée dotation minimale, financée par le Canton, portera ce ratio à 90 %.
La commune retirera également un montant supérieur à celui de sa contribution à la péréquation basée sur les recettes d’impôts dits conjoncturels : successions, donations, gains immobiliers, droits de mutation et impôts des frontaliers.
Perdante sur deux points
Deux domaines sortent du pot péréquatif : la cohésion sociale et la police. Avec la réévaluation à la hausse de ses ressources, la commune sera perdante à ces niveaux. La cohésion sociale comprend les prestations complémentaires à l’AVS/AI, l’aide aux personnes en EMS, les subsides à l’assurance-maladie, l’aide sociale aux familles et aux particuliers, le revenu d’insertion (RI), les bourses d’études ainsi que les aides aux personnes en situation de handicap. La refonte du système ancre désormais une répartition prévue en francs par habitant. « Sainte-Croix va payer beaucoup plus qu’actuellement », relève Jean-Michel Brandt, boursier communal. À noter que le Canton prévoit d’alléger la douloureuse en accroissant sa participation à l’augmentation des dépenses sociales à 67 %, (33 % pour les communes), puis selon le ratio 83/17 % dès 2026, ceci en réponse à l’initiative SOS Communes.
Pour les communes qui font appel à la police cantonale, ce qui est le cas de Sainte-Croix, la part facturée se calcule également en francs par habitant. Là aussi, la note prend l’ascenseur, constate le boursier.
Trois éléments
Les dépenses thématiques prises en compte dans le système actuel sont remplacées par une péréquation des besoins structurels, qui se compose de trois éléments : premièrement les surfaces productives, soit celles dédiées à l’habitat et aux infrastructures ainsi que les surfaces agricoles et boisées. Une surface productive élevée par habitant a pour corollaire des charges de gestion du territoire plus lourdes. Avec une surface de 3875 hectares pour 4869 habitants (chiffres 2022) Sainte-Croix est concernée et bénéficie d’une compensation financière. Il en va de même pour l’altitude (+ de 700 mètres) et la déclivité du terrain, qui permettent à la commune d’être soutenue dans ses frais d’entretien.
En outre, le mécanisme revisité prend en compte les charges particulières des villes centres, ce qui est le cas de la principale commune du Balcon du Jura. Un barème progressif selon les couches de population laissera un avantage non négligeable à Sainte-Croix. Dans un autre registre, la commune participera au déficit des lignes de trafic urbain financé par l’ensemble des communes, avec une répartition en francs par tête.
Soulagement à Bullet et Mauborget
Globalement, trois quarts des communes vaudoises sont avantagées par le nouveau système péréquatif (230 sur 300). Les 70 communes perdantes auront droit à une compensation financière transitoire dégressive jusqu’en 2029, selon le texte de loi. Syndique de Bullet, Maude Schreyer constate : « Nous sommes bien conscients qu’avec ce genre de changement, il y a toujours des perdants et des gagnants, ou tout du moins des communes plus ou moins avantagées dans le cas présent ». Mais elle est aussi d’avis que le système est favorable à la grande majorité des communes et qu’il permet de répartir les ressources de manière nettement plus objective qu’auparavant ».
« Nous sommes surtout soulagés de rester bénéficiaires de la péréquation », témoigne Maude Schreyer. Ceci grâce notamment à la nouvelle péréquation des ressources et des besoins, « qui permet d’équilibrer les augmentations liées à la participation à la cohésion sociale ainsi qu’à la facture policière… » Cependant, la syndique de Bullet est consciente « qu’en termes concrets, nous allons devoir apprendre à fonctionner un peu différemment, du moment qu’il ne sera plus possible de compter sur les retours péréquatifs liés aux dépenses thématiques, dont nous avons pu profiter par le passé ». Les prévisions globales étant calculées en légère augmentation, Bullet n’est « à l’heure actuelle pas inquiet pour l’avenir ».
Du côté de Mauborget, Claude Roulet, syndic, ne pavoise pas à l’idée que sa petite commune devrait bénéficier d’une nette augmentation de la péréquation. Avec son franc-parler habituel, il lâche : « C’est bientôt le moment que le Canton, qui a beaucoup pris aux citoyens et aux communes, en redonne un peu, et que l’on puisse mieux respirer. Mais il faudra voir dans cinq à six ans s’il ne revient pas à la charge ».
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