Les acteurs économiques locaux sont raisonnablement confiants pour l’année qui commence. En particulier les entreprises du bâtiment. Le commerce de détail est plus touché par les hausses en cascade et les changements d’habitude des consommateurs.
« Le contexte géopolitique et la situation inflationniste incitent les plus pessimistes à craindre une année 2024 compliquée », exprime Joakim Junod, président de la Société industrielle et commerciale (SIC) de Sainte-Croix et environs. Tous les domaines d’activité ne sont cependant pas logés à la même enseigne.
Dans le secteur de la construction, « les commandes sont là », constate Joakim Junod, à la tête de Junod Peinture Sàrl. Depuis décembre 2023, les patrons enregistrent certes une légère baisse des entrées, mais le phénomène est plus saisonnier que conjoncturel. « En fin d’année, les gens ont l’esprit aux Fêtes et au ski », exprime-t-il. Yannick Chablaix, patron de l’entreprise Mix-Bois à Bullet fait également état « d’un cahier de commandes plutôt bon ».
Hausse des charges
En ce qui concerne les charges, les prix des matériaux, « qui avaient pris 30 % d’un jour à l’autre pendant le COVID, ont une petite tendance à baisser ou à se stabiliser », note Joakim Junod. Les tarifs de l’électricité restent hauts, tandis que le carburant a un peu baissé.
Le secteur de la construction est régi par des conventions collectives de travail (CCT). Dans le second œuvre, par exemple, l’augmentation horaire décidée par les partenaires sociaux est de 70 centimes de l’heure, avise Joakim Junod.
La pandémie avait durement frappé le domaine de la restauration. « Aujourd’hui, comme pour les cinémas, il y a un retour de la clientèle », relève le président de la SIC. Cela vaut en particulier pour le repas de midi, où les restaurants sont généralement pleins. Le soir, cela reste plus difficile. Reprise juste avant la pandémie, La Tanière du 12 va fermer à fin janvier, fait part Eliane Divorne. Malgré les animations proposées – soirées jeux, karaokés, concerts – « l’activité n’a jamais repris après la pandémie ». « Grâce à sa restauration, le Café 12 (l’autre café d’Eliane Divorne) soutenait la Tanière, mais sans amélioration, il a fallu se résoudre à arrêter ». Toujours à la recherche de solutions, la tenancière annonce que le Café 12 sera également ouvert le dimanche dès février, de 11 heures à 15 heures.
Au Fleury Bar, Véronique Gonthier est plus confiante : 2023 s’est bien déroulée, la terrasse a été un atout jusque tard dans la saison. Elle espère que 2024 sera de la même veine, mais elle constate déjà que des personnes âgées qui venaient tous les jours boire un café sont contraintes d’espacer leurs passages pour réduire leurs dépenses.
Changements d’habitude
Les hausses en cascade, loyer, assurances maladie, alimentation générale, modifient les habitudes d’achat des consommateurs. « Les gens partent encore en vacances et/ou vont faire du ski, mais se rendent moins dans les commerces locaux », expriment en substance plusieurs intervenants.
Du côté des métiers de bouche, Vincent Junod, patron de la boucherie éponyme relève les difficultés rencontrées par la branche, en lien avec l’évolution de la société. « Les gens mangent moins de viande, en particulier de saucisson ou de lard ». L’artisan boucher, qui représente la quatrième génération à la tête du commerce, a toujours à cœur de satisfaire sa clientèle et met en avant une bonne collaboration avec les petits restaurants du Balcon, comme les chalets d’alpage.
À L’Auberson, Vincent Tyrode évoque une situation contrastée. Les stocks de fromage sont trop importants, « mais on a déjà connu cette situation, qui n’est pas catastrophique ». Et le commerce de détail « est très satisfaisant avec une proportion de l’ordre de 50 % de clientèle frontalière ». Anticipant un peu la retraite, le primeur Martial Barrière a fermé boutique.
De plus en plus concurrencées par la vente en ligne, certaines enseignes de commerce de détail sont à la peine. En particulier dans le domaine vestimentaire. Nicole Frossard, à la tête de la Boutique La Bohême avec Simonetta Della Pietra, confie que 2023 a été une année difficile. Avec des températures estivales, les ventes d’automne, notamment, ne se sont pas faites. Les deux responsables réfléchissent à diversifier et à renouveler plus souvent leurs collections, afin d’attirer une clientèle complémentaire aux fidèles habituées. « Nous gardons le moral et espérons une embellie pour 2024 », note Nicole Frossard.
Active dans les vêtements de seconde main, la boutique Dadou a baissé le rideau sans trouver de repreneur. Ce segment de marché est désormais occupé par les magasins « Au Petit Bonheur » et « J’trouve tout ».
Jouer le jeu
Le secteur de l’automobile pâtit également de la baisse du pouvoir d’achat. Christophe Cuendet, patron du garage du Balcon du Jura, avoue beaucoup d’incertitudes, notamment liées au marché des véhicules électriques confronté au manque d’installations de recharge et au contexte énergétique. Le prix des voitures neuves est trop élevé pour la plupart des bourses, estime en outre le garagiste qui souligne que les gens ont davantage tendance à réparer leur voiture qu’à la changer. Il y a du travail a priori, mais les perspectives à moyen et long terme sont floues.
« Nous avons subi une forte inflation en 2023, mais nous avons pu assurer une continuité. Nous sommes une petite structure, avec un savoir-faire et du bon personnel et nous pouvons nous adapter rapidement », confie Christian Jaccard, patron de la quincaillerie familiale. La diversification apportée avec l’ouverture d’un rayon papeterie – suite à la fermeture de ce commerce dédié -, a par exemple attiré une nouvelle clientèle au magasin de la rue des Rasses, ce qui lui évite de se déplacer en plaine. La quincaillerie papeterie a également réduit les stocks, mais peut compter sur la rapidité de livraison de ses fournisseurs, expose le patron qui table aussi sur le bon fonctionnement de son magasin beaux-arts d’Yverdon et du shop en ligne.
Le président de la SIC, Joakim Junod, met l’accent sur l’effet positif de l’économie circulaire. La commune de Sainte-Croix et le Réseau de santé du Balcon du Jura achètent des bons SIC en fin d’année pour leurs collaborateurs. « Ce sont des dizaines de milliers de francs qui retombent ainsi dans l’économie locale ». Exploitante de la boutique Tineuf, Katia Pidoux en a notamment bénéficié. Elle relève avoir accueilli davantage de clients dans sa boutique de jouets à la période de Noël que l’année précédente. Elle souhaite que les habitants du Balcon continuent à jouer le jeu des commerces locaux, où ils trouvent qualité et conseil.
Le Comptoir de Sainte-Croix offre aussi une opportunité aux commerçants de resserrer les liens avec leur clientèle. Joakim Junod signale que la prochaine édition aura lieu au Centre sportif du 27 février au 2 mars 2025.
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