
© Photo : C. Carisey
La Compagnie de la Marelle est venue présenter dimanche 3 novembre sa dernière création théâtrale « Sur le balcon du baobab » à la salle communale de Sainte-Croix. Le thème du colonialisme, les échanges entre les pays du Nord et ceux du Sud et certains préjugés qui ont encore cours aujourd’hui ont été mis en scène avec beaucoup d’humour.
Le 1er acte se situe en 1910. C’est à cette époque que dans toute l’Europe apparaissent des sociétés de missions, il y en a plus de trois cents. L’impulsion a été donnée par un citoyen anglais, Sir William Carey, qui a écrit un manifeste missionnaire : « Du devoir qu’ont les chrétiens de se donner les moyens de convertir les païens ». De nombreuses vocations naissent alors, et c’est à Bâle qu’un jeune pasteur exprime sa volonté de devenir missionnaire en Afrique. Il passe devant une commission chargée d’évaluer ses capacités à remplir son rôle. Les questions posées n’ont pas toujours un rapport avec sa future mission et dénotent la rigidité de l’église de l’époque.
Le pasteur est finalement nommé et part pour l’Afrique. C’est alors le choc des civilisations ! Les Africains découvrent avec stupéfaction cet homme qui ne fait que travailler et ne se repose jamais ! Quant au pasteur, il essaie d’expliquer la philosophie occidentale qui consiste à travailler toujours plus pour gagner encore plus, pour acheter plus de choses… ce qui laisse perplexe les autochtones.
Retour en Suisse, à Moudon, où l’on assiste à une réunion des « Amies de la Mission ». Mesdames Amélie et Gertrude se réunissent chaque semaine et elles ont reçu une lettre du pasteur missionnaire. Il se plaint que le thé envoyé par Mme Amélie n’a pas de goût. C’est normal, puisqu’elle fait des paquets avec du thé qui a déjà servi deux fois ! Il demande également s’il est possible d’envoyer en Afrique des appareils dentaires. Mme Amélie a eu une idée géniale : devant Mme Gertrude, médusée, elle vide un carton entier de dentiers récupérés chez M. Pittet des pompes funèbres !
L’indépendance et la décolonisation
Pour le deuxième acte, nous sommes en 1960. La plupart des pays d’Afrique sont en train de gagner leur indépendance mais cela ne se passe pas sans heurts. Les blancs avaient mis en place des infrastructures étatiques comme la police, la justice et la poste et tous les cadres sont européens. Certains aimeraient bien mettre dehors tous les Blancs mais d’autres se rendent compte qu’il serait préférable de faire les choses en douceur pour assurer la transition, sous peine de voir le chaos s’installer rapidement.
Du côté des missionnaires, le départ est difficile. Ils sont rappelés en Europe mais laissent derrière eux une partie de leur vie et leurs frères africains. Ces derniers ne comprennent pas non plus pourquoi l’église, elle aussi, les abandonne. Les adieux sont déchirants.
Les Africains coachent une paroisse suisse
Troisième acte, 2010. Depuis la fin du vingtième siècle, on cherche de nouveaux chemins pour penser les rapports entre le Nord et le Sud, davantage basés sur l’échange et le partage. Mais bien que la planète soit devenue un village global, certains réflexes ataviques ont la vie dure. On assiste à une scène de ménage entre un père vieux-jeu et sa femme qui a engagé un professeur privé pour aider leur fils qui a des difficultés scolaires. Mais le professeur est noir, ce qui déclenche l’ire du mari. Surtout qu’il a réussi non seulement à motiver leur fils pour ses études mais aussi à l’intéresser à la percussion africaine…et le jeune s’en donne à cœur joie !
Dernière scène, deux Africains ont été mandatés par une Église de Suisse pour trouver des solutions à la désaffection des fidèles. Entre autres, ils suggèrent d’adapter certains textes bibliques afin de les rendre plus compréhensibles ou commencer le culte par de la danse. Comme le dit un proverbe zoulou : « si tu veux arriver vivant de l’autre côté de la rivière, ne demande pas à l’hippopotame d’aller dormir ailleurs », autrement dit, ne demande pas aux autres de changer mais change quelque chose chez toi !
M. Guinet
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