Un dossier très solide a été déposé à Paris

« Le petit escamoteur », ici sous l’œil attentif de l’automatier Nicolas Court, atteste d’un savoir-faire qui remonte aux années 1800. © C. Carisey

Les dés sont jetés. La candidature des Savoir-faire en mécanique horlogère et mécanique d’art a été déposée à l’UNESCO en vue d’une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Le verdict est attendu en novembre 2020. L’Office fédéral de la culture souligne une « collaboration exceptionnelle » avec le microcosme ste-crix de la mécanique d’art et des boîtes à musique.

La fabrication d’automates et de boîtes à musique, caractéristique de la région de Sainte-Croix, sera-t-elle auréolée d’une inscription à l’UNESCO dans dix-huit mois ? C’est en tout cas le ferme espoir du groupe de pilotage qui a déposé le 21 mars 2019 à l’UNESCO à Paris un dossier de candidature des Savoir-faire en mécanique horlogère et mécanique d’art. Une démarche préparée sous l’égide de l’Office fédéral de la culture (OFC) et élargie à la France, les savoir-faire en mécanique horlogère étant bien présents dans tout l’arc jurassien, des deux côtés de la frontière.

Pour la région de Sainte-Croix-L’Auberson, cette candidature est une évidence, tant la région foisonne d’artisans d’art hautement qualifiés, actifs dans la création et la restauration de boîtes à musique, d’automates, de pendules, de montres ou d’horloges, souligne Séverine Gueissaz, membre de la fondation du Centre international de la mécanique d’art (CIMA) et, avec Alain Dugon, doyen de la filière mécanique au CPNV, cheville ouvrière du groupe de préparation du dossier déposé à Paris. Des spécialistes comme François Junod, Nicolas Court, Dominique Mouret, Michel Bourgoz, Vianney Halter et Denis Flageollet sont très engagés dans le projet. « La collaboration a été exceptionnelle », souligne Julien Vuilleumier, de l’Office fédéral de la culture, en charge de la préparation, de la coordination et du suivi des dossiers des candidats. Il salue ce qu’Etienne Blyelle - ce spécialiste de la boîte à musique aujourd’hui disparu qui avait des contacts étroits avec le CIMA et le Musée Baud - appelait « l’esprit de Sainte-Croix ». Un esprit qui se traduit par la capacité d’échanger, de s’épauler en cas de problème, de travailler ensemble, qui a touché également les membres du groupe de travail français de la région de Morteau et de Besançon.

Des atouts précieux

Le CIMA et le Centre professionnel du Nord vaudois (CPNV) sont de toute évidence parties prenantesde la candidature. Le CIMA en tant que lieu qui conserve les objets, les entretient et les montre au public. Et le CPNV comme école dispensant une formation de base en mécanique. Les deux étant impliqués dans la nouvelle formation en mécanique d’art (FEMA), soutenue par la commune et le canton.

Autre aspect très positif, la population elle-même adhère au projet. Parmi la grosse centaine de lettres de soutien émanant des habitants de l’arc jurassien, la moitié est venue du Balcon du Jura.

Un atout de la candidature des Savoir-faire en mécanique horlogère et mécanique d’art réside également dans son lien avec l’Urbanisme horloger de La Chaux-de-Fonds et du Locle, inscrit lui au Patrimoine mondial en 2009. Comme la région de Lavaux ou les sites pallafittiques, l’urbanisme horloger est entré dans la catégorie des biens naturels et culturels, dont les dossiers sont portés par l’Office fédéral de l’environnement (OFEN). Tandis que l’association WHES, créée en 2009, regroupe les douze sites suisses naturels et culturels inscrits sur la liste du Patrimoine mondial. Elle vise notamment à promouvoir ces sites à caractère exceptionnel, en partenariat avec Suisse Tourisme et les offices du tourisme locaux.

Cinq critères à respecter

La rédaction du dossier par un petit groupe comprenant Séverine Gueissaz et Alain Dugon n’a pas été une sinécure. Il décrit notamment l’aire géographique, les métiers et disciplines concernés et bien sûr les détenteurs de savoir-faire. Et il répond aux cinq critères imposés : en premier lieu correspondre à la définition du patrimoine culturel immatériel et respecter les principes des droits humains et du développement durable. « Les mesures de sauvegarde de savoir-faire menacés constituent le corps du dossier », souligne Séverine Gueissaz, qui illustre son propos : « Michel Bourgoz, par exemple, est le dernier réparateur d’automates et de boîtes à musique. Tandis que les horlogers complets sont de plus en plus rares ». Le quatrième critère concerne les communautés, qui doivent être impliquées dans l’élaboration du dossier et donner leur avis. Selon le cinquième critère enfin, les éléments sur lesquels s’appuie la candidature doivent déjà être inscrits dans des inventaires nationaux.

Le document est complété par une dizaine de photos et un film réalisé par Alain Margot et le journaliste Olivier Kohler. Le groupe d’accompagnement, qui comprend des artisans, des musées et des écoles, a été régulièrement consulté au cours de la préparation du dossier.  Ce qui a permis de favoriser les échanges des deux côtés de la frontière ainsi qu’entre horlogers, automatiers et artisans des boîtes à musique.

Le dossier va passer un examen technique auprès de l’Unesco, une procédure qui durera près de 18 mois. L’UNESCO devrait décider en novembre 2020 de l’inscription du savoir-faire horloger et de la mécanique d’art sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Tant Julien Vuilleumier que Séverine Gueissaz sont confiants : « Nous allons y arriver, nous avons un dossier très solide, qui correspond à tous les critères ».

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