Réduire les émissions de gaz à effet de serre et adapter le territoire communal au changement climatique : ce sont les objectifs du Plan Énergie et Climat communal (PECC) lancé par la commune de Bullet. Elle s’engage, à son échelle, dans une transition énergétique et environnementale. Une démarche incitative pour les habitants, qui ont participé à son élaboration. Une dizaine de mesures ont été priorisées.
Oui, une commune de 651 habitants, hameaux compris, située dans le Jura vaudois, peut faire beaucoup pour améliorer son bilan carbone et adapter le territoire communal au changement climatique en cours. La Municipalité de Bullet s’est engagée dans l’exercice d’un plan Énergie et Climat communal (PECC), sur le modèle recommandé par l’État de Vaud et avec l’aide du bureau conseil vaudois eqlosion Sàrl, plus particulièrement de la cheffe de projet Fanny Gabioud. Récemment, l’exécutif bullaton a validé la démarche, consignée dans un document de 44 pages. Le PECC a également obtenu l’approbation du canton, qui participe à 50 % de la facture de l’élaboration du plan et de la planification des actions communales sur une période de 4 ans, soit jusqu’en 2027.
Le municipal Patrice Jaquier est en charge de la coordination du PECC de Bullet. « Nous savions d’emblée que ce serait un gros travail, un état des lieux à tous les niveaux, énergie, mobilité, achats, etc », exprime-t-il en substance. Conscient de l’urgence de s’attaquer aux enjeux climatiques, l’exécutif a préféré se montrer « proactif et choisir ses priorités » plutôt que d’attendre et de se voir imposer des contraintes par la Confédération et le Canton.
Sept fois New York
Au début du PECC, il s’est agi de mettre en évidence les quantités de gaz à effet de serre émises par la collectivité, de manière directe et indirecte. L’augmentation de leur concentration dans l’atmosphère terrestre étant l’un des facteurs à l’origine du changement climatique qui se traduit déjà par des périodes de canicule, une augmentation de la fréquence et de l’intensité des précipitations ainsi qu’une diminution des chutes de neige.
Qu’il s’agisse de bâtiments communaux ou de privés, le chauffage aux énergies fossiles, et dans une moindre mesure au gaz, représente la part du lion des émissions de gaz à effet de serre (GES). La consommation et la mobilité complètent le trio de tête des émetteurs de GES.
Globalement, Bullet produit 12’600 tonnes de CO2, soit 19,3 tonnes par habitant, au-dessus de la moyenne suisse (15 tonnes). Comme si chaque Bullatone et chaque Bullaton embarquait sept fois par an sur un vol Genève-New York et retour ! « Nous n’avons pas été surpris par ce bilan carbone », commente Patrice Jaquier. « Une commune rurale, avec 45 % de surface boisée, a besoin de beaucoup de mécanisation. La forêt est certes un puits de carbone, elle nous protège, nous aide à respirer et améliore notre qualité de vie, mais son entretien et son exploitation se font de manière mécanisée, de même que le déneigement ». De plus, à 1200 mètres d’altitude, le besoin de chauffage est important. Environ 60 % des installations recourent aux énergiques fossiles, mazout et gaz, dans la moyenne vaudoise et nationale.
« Au niveau communal, 88 % des bâtiments doivent faire un effort énergétique », souligne le PECC dans la version finale de son rapport. La commune, qui se veut exemplaire, va par exemple isoler le bâtiment Bertha Bonnet, refaire sa toiture et poser des panneaux solaires. Le collège et la grande salle ont déjà bénéficié d’un changement de chauffage au profit de l’utilisation de bois des forêts communales.
Avec 5800 kWh par habitant et par an, la consommation d’électricité moyenne est également supérieure à celle du canton (4’973). Cependant, la production d’électricité photovoltaïque a triplé depuis 2015 et le parc éolien, s’il est réalisé, augmentera considérablement la part des énergies renouvelables.
Démarche inclusive
« Le bureau conseil eqlosion s’est démarqué par son savoir-faire en matière de démarche participative », souligne Patrice Jaquier. « Avec Maude Schreyer, syndique, nous souhaitions demander en amont l’avis de la population, ce qui se fait très peu dans les communes ». À Bullet, cela a pris la forme d’un sondage auquel 80 personnes ont répondu, et d’un atelier participatif qui a réuni une trentaine de personnes. « Nous les avons écoutées et intégré leurs suggestions dans nos fiches actions », évoque le municipal. Par exemple l’étude de systèmes de chauffages à distance, idée qui avait été balayée dans les années nonante. « Aujourd’hui, des propriétaires qui doivent remplacer leurs chaudières ont un intérêt pour de telles installations ». Le PECC a inclus le développement de réseaux de chaleur d’origine renouvelable dans ses fiches d’action. Pour fidéliser l’engagement de la collectivité, la commune souhaite constituer un groupe d’ambassadeurs du PECC.
« L’arbitrage n’est jamais simple », reconnaît le municipal, par exemple lorsqu’il s’agit de concilier la protection de la biodiversité et le soutien au parc éolien de la Grandsonnaz. « Les associations de protection de la nature ont été consultées et un certain nombre de leurs demandes ont été prises en compte. D’un autre côté, si nous voulons diminuer notre empreinte carbone avec le remplacement de nos chauffages et l’achat de véhicules électriques, nous devons disposer d’électricité renouvelable », avise Patrice Jaquier.
La mise en œuvre des actions définies par le PECC est prévue de 2024 à 2027. « Mais on ne va pas s’arrêter là, la commune vise la neutralité carbone à l’horizon 2050 ».
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