Le préfet du Nord vaudois a rejeté le 12 mai dernier le recours déposé par un comité référendaire contre la votation communale du 22 septembre 2024 à Bullet. Un pas en avant pour le parc éolien de quinze machines de la Grandsonnaz. Un recours reste possible.
« D’un point de vue légal, les recourants doivent démontrer la vraisemblance des anomalies dénoncées », avise en préambule Fabrice De Icco, préfet du Nord vaudois, à propos de sa décision, prise le 12 mai 2025, de rejeter le recours déposé par un comité référendaire contre la décision du Conseil communal de Bullet relative au permis de construire du parc éolien de la Grandsonnaz. Dans le cas présent, poursuit en substance le Préfet, « malgré les pièces produites et leurs déclarations en entretien, les recourants n’ont pas démontré que les anomalies signalées avaient influencé le scrutin du 22 septembre 2024 ».
Pour mémoire, lors de la votation du 22 septembre 2024, avec une participation citoyenne de 73,4%, vingt-deux voix séparaient les partisans des opposants au parc éolien porté par la société Ennova. Cette dernière prévoit la construction de 15 machines de 150 mètres de haut sur le flanc nord-est du Chasseron. Le comité référendaire constitué juste après le vote considérait que les trois autres communes concernées par le projet, à savoir Fiez, Fontaines-sur-Grandson et Mauborget s’étaient immiscées dans la campagne en distribuant aux habitants de Bullet un tous ménages portant entête officielle, signé par les syndics et les secrétaires. En grandes lignes, la lettre informait les Bullatons que le projet continuerait sans Bullet malgré tout. Le comité demandait l’annulation du vote.
Nombreuses auditions
Contacté hier par téléphone, le comité référendaire « prend acte et regrette le rejet de son recours », qu’il qualifie « de décision où la politique prime sur la justice». Le comité n’a pas encore pu se réunir « pour décider d’une position commune sur la suite qu’il entend lui donner», indique la conseillère communale Sandra Blaser. Un recours à la Cour constitutionnelle, à Lausanne, est possible dans un délai de 10 jours ouvrables à compter de la publication de la décision, précise le Préfet.
Du côté de la Municipalité, Patrice Jaquier met en avant « l’excellent travail de fond réalisé par le Préfet De Icco qui a pris le temps d’entendre non seulement les parties, mais également des acteurs proches du dossier, afin de se faire l’idée la plus précise possible du contexte de la votation… » L’exécutif prend acte de la décision, « rassurée que le processus démocratique ait fait ses preuves une fois de plus ».
Dans ses considérants, le Préfet précise avoir auditionné une délégation de la Municipalité de Bullet et du comité référendaire, de même que les syndics des communes de Fiez, Fontaines-sur-Grandson et Mauborget. Il s’est également entretenu avec Laurence Rausis, conseillère en communication qui travaille sur mandat pour Ennova et qui accompagne un groupe de soutien au projet éolien dirigé par Jean-Franco Paillard. Ce dernier, ancien syndic de Bullet, a été entendu à titre subsidiaire. Le Préfet note qu’il ressort des auditions « que le tous-ménages a été rédigé par les syndics précités à l’initiative de Jean-Franco Paillard et qu’il a été coordonné par Laurence Rausis… »
Recours pendant
Indépendamment de la procédure précitée, un recours de quatre ONG contre le permis de construire accordé au parc le 20 juin 2022 par approbation du plan d’affectation intercommunal, est pendant à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal (CDAP). Elles dénonçaient « une étude d’impact lacunaire » et soulignaient que le parc, initié en 2007, « occasionnera des dégâts bien trop élevés en regard de la production d’énergie attendue».
Patrice Jaquier indique que cette procédure avance et qu’une première audience avec visite de site est agendée. Coordinateur des affaires juridiques à Pro Natura, Kevin Mc Millian communique de son côté qu’une vision locale est agendée sur le terrain le 27 mai, avec toutes les parties concernées.
Une décision de la CDAP est attendue « dans les mois à venir », selon Patrice Jaquier. De leur côté, les ONG n’imaginent pas une annulation du projet, mais espèrent de meilleures mesures de compensation, en particulier en faveur de la protection des oiseaux. Ils ont encore la possibilité d’un recours au Tribunal fédéral.
Droit de surperficie
Le 20 juin 2022, le Conseil communal de Bullet avait refusé d’accorder un droit de superficie à la Commune pour l’installation de deux des cinq éoliennes prévues sur le territoire bullaton, tout près des fermes de la Grandsonnaz-Dessus et de la Grandsonnaz-Dessous. Lorsque la voie sera libre pour la construction du parc, l’exécutif devra soumettre à nouveau cette question à son organe délibérant. « La Municipalité n’entreprendra probablement aucune démarche avant la décision de la CDAP », avise Patrice Jaquier.
Consulté après la votation de septembre 2024, Emmanuel Guérin, chef de projet du parc éolien de la Grandsonnaz estimait que si les ONG poursuivaient jusqu’au Tribunal fédéral, il faudrait encore deux ans pour obtenir une autorisation en force.
C. Dubois