Voilà maintenant 40 ans que L’Boxon anime la vie foraine et musicale de la région et d’ailleurs. L’ensemble, qui célèbrera son anniversaire le 8 novembre prochain, né jadis d’un projet amical et désormais fermement établi, mêle sans relâche sa mission, qui associe cohésion sociale et pratique musicale. Un projet qui a vu passer plusieurs générations de mêmes familles.
Si, aujourd’hui, la réputation de la guggen n’est plus à faire, il convient de rappeler que Rome ne s’est pas faite en un jour. Tout débute en 1985, en parallèle du premier carnaval de Sainte-Croix, à la MJC de l’époque.
Les tambours de Sainte-Croix et de Bullet constituent à ce moment-là un ensemble pour animer les festivités. Ses membres d’alors expliquent y avoir vu davantage un projet spontané, et ne se doutaient nullement des proportions que finirait par prendre cette idée. Quelques années plus tard, l’ensemble est rejoint par les « souffleurs » de L’Auberson, et ses effectifs vont crescendo, jusqu’à ce qu’il puisse enfin prétendre au titre de guggen en 1988. Un an plus tard, celle-ci prend le nom de « L’Eau Bulle et Son » avant de finalement se faire baptiser « L’Boxon », sobriquet contemporain de l’orchestre.
Un peu d’histoire
À ses débuts, à défaut d’un local qui lui appartienne, l’orchestre répète dans un espace du musée Baud. Ensuite, il loue officiellement un espace au troisième étage de l’Industrie 21, avant de descendre au rez de chaussée du même bâtiment dans les années 90, qu’il investit encore aujourd’hui.
À l’époque comme maintenant, ses anciens et présents membres s’accordent à dire que la possession des lieux permettait, d’une part, d’instaurer des répétitions régulières (d’ensemble comme de registre) et d’ancrer plus fermement la société. Cela offrait aussi un espace de regroupement, où musique et festivités trouvaient leur lieu. En effet, il n’était pas rare qu’à l’issue des répétitions, on y rigole bien. Parfois, l’alcool y a coulé à flot, et il s’y est passé « bien des conneries » (que l’on tiendra secrètes) « jusqu’à tard le soir », expliquent ses membres fondateurs, parmi lesquels on compte entre autres Michel Bourgoz, Stéphane Champod, Jean-Franco Paillard, et Laurent Margot.
Une société musicale amicale et familiale
Aujourd’hui, L’Boxon comprend près d’une cinquantaine de musiciens, et se voit piloté par un comité de cinq personnes dont font partie Bjorn Oskam, Maxime Mischler, Kelly Berthoud, Laura Ferrari et Mathis Bernardi.
Il est curieux de constater que plusieurs des musiciens actuels, en plus d’être amis, voire copains-copines, comptent plus d’une décennie d’engagement, ou sont membres pour certains d’une même famille (frères et sœurs ou cousins), mais aussi pour certains enfants (ou élèves) de la génération précédente, parfois même au sein du même registre.
En effet, Janique Ferrari, ancienne membre et enseignante au collège de Bullet, elle-même mère de Laura Ferrari, membre, explique avoir eu Samuel Champod, ainsi que Mathis, Léo et Adam Bernardi pour élèves. Tandis que Stéphane (batterie) et Marie-Claire Champod parents de Samuel (batterie), ont compté parmi les membres de l’orchestre, c’est aussi le cas de François Bernardi (trombone), père d’Adam (trompette) et de Léo (trombone), et de David son frère, père de Mathis Bernardi (tous deux trompettistes). Christophe Thévenaz (dit « tout gaz ») et Mélanie, parents de Candice, viennent compléter cette stature d’orchestre familial.
On en conclut rapidement que L’Boxon n’est pas qu’une histoire entre amis, mais également une affaire de famille intergénérationnelle.
Valeurs phare, héritage et évolutions
Que reste-t-il, 40 ans plus tard, de l’impulsion lancée par les membres fondateurs ?
Interrogés à ce sujet, les anciens expliquent observer avec admiration l’amélioration notable des performances musicales, et se réjouissent de la réputation de l’orchestre, qui outrepasse désormais sa région natale en se produisant régulièrement dans les carnavals et festivités régionales ou éloignées.
Aujourd’hui, il n’est pas rare que la guggen convie des collègues voisins, mais aussi des ensembles suisses-alémaniques reconnus, comme c’est le cas pour le programme du 40e anniversaire à venir).
« On ne se rendait pas tellement compte de ce que l’orchestre deviendrait », explique David Bernardi qui, avec son frère, François, ont fait sonner la guggen dès ses premières années. L’ensemble leur semble « plus sérieux qu’à l’époque ». « C’est moins la foire qu’à l’époque ». Et on y observe davantage de discipline musicale, « mais pas trop quand même : ce n’est pas une fanfare militaire ». Aucun des anciens n’envisage pour autant de revenir dans la société, chacun y ayant « fait son temps », mais en conserve des souvenirs « inoubliables ».
Du côté des plus jeunes ou des nouveaux, interrogés à ce sujet, Adam Bernardi explique que la « binch » occupe toujours au sein de la société une place d’importance, sans négliger pour autant l’aspect social et le plaisir d’une pratique musicale d’ensemble, contrebalance son frère, Léo Bernardi. Le premier se rattrape alors en expliquant que peu de guggens romandes peuvent prétendre à un niveau musical tel que le leur, et à une ambiance autant fédératrice. L’orchestre a conservé sa vocation formatrice, invitant tout un chacun, y compris les néophytes, à faire leurs armes en musique.
À cet effet se tiennent encore des répétitions de registres et d’ensemble, où l’entraide est de mise. Le local de répétition fourmille d’anecdotes qui s’accumulent au fil des ans.
Une affaire de tradition ou de vocation
Parmi les raisons qui motivent les jeunes à participer au sein de la société, pour les deux Bernardi comme pour les sœurs Margaux et Fiona Weber, il en allait de la tradition familiale pour les deux premiers, tandis que « c’était une évidence » pour les deux autres, elles qui baignent depuis toujours dans l’univers des guggens. Il semblait effectivement tout indiqué que les enfants reprennent la torche pour que « perdure la tradition », explique Samuel Champod.
Tous prennent du plaisir à jouer lors des répétitions, et apprécient la bonne ambiance qui y règne, puisque c’est l’occasion de sociabiliser, et, bien entendu, de festoyer.
Si l’âge, la vie familiale et celle professionnelle représentent souvent un frein à l’engagement musical à terme, au vu des conjonctures, l’orchestre semble destiné à perdurer, ses rangs semblant se renouveler naturellement. Les membres actuels n’excluent pas que leurs futurs enfants poursuivent la route, s’engageant en tout cas à les motiver dans cette voie.
Ce sont donc les 40 ans d’une société locale et fédératrice qui seront mis à l’honneur le 8 novembre prochain au Centre sportif de Sainte-Croix, à l’occasion de cette festivité-anniversaire.
L.-G. Alloati

