Les parents qui amenaient leurs enfants à la garderie et l’accueil extra scolaire les Trolls en tablier bleu ont été conviés vendredi à un café-croissant et un moment de discussion. Mamans et papas se sont exprimés sur le thème de l’égalité.
« L’égalité, c’est que ton petit frère puisse faire de la danse classique et toi devenir ingénieure et construire des fusées si c’est cela que vous voulez », expliquaient vendredi Aurélie Reymondin et la directrice de la garderie, Evelyne Jelk à une petite fille qui s’interrogeait sur le thème du jour, la grève des femmes. La structure de garde d’enfants, soucieuse de ne pas laisser les parents sans solution avec une grève, avait choisi un moment de discussion plutôt qu’un débrayage. « Les parents, tant les hommes que les femmes, sont solidaires. Plusieurs d’entre eux nous ont dit vouloir rechercher les enfants plus tôt ce soir, afin que les éducatrices puissent aller à la manifestation », relève la directrice.
L’égalité concerne toutes les générations, mais elle débute au berceau ou presque. Evelyne Jelk a rappelé lors des discussions le travail des éducatrices de la crèche pour laisser les enfants s’orienter aussi bien vers les poupées que l’établi et ses outils, quel que soit leur sexe. « Nous n’avons plus d’espaces spécifiquement séparés et dédiés aux filles ou aux garçons ».
Dans les deux sens
Quant au partage des tâches, chaque papa a son idée sur la question. Sasa Lazic estime « normal que j’amène mon fils à la crèche, je peux le faire, je n’ai pas de travail en ce moment ». Un peu plus tard, Raphaël Mura plaide lui aussi pour l’égalité, mais plutôt dans le sens où le couple définit ensemble les rôles de chacun. En l’occurrence, son épouse se consacre aux enfants pendant leurs premières années d’existence.
De son côté, Steve Benoit se déclare favorable à un partage du temps de travail, afin que les deux parents puissent s’occuper de l’éducation des enfants. « Cela fait longtemps que je travaillerais à temps partiel si j’en avais la possibilité ». Pour des raisons de revenus, c’est son épouse qui a diminué son temps de travail à 50%. Il assure que le couple se partage les tâches domestiques et qu’il lui arrive de faire la cuisine. Au passage, il relate une anecdote : sa femme et sa fille suivent un cours de gymnastique mère-enfant. Un jour où elle avait un empêchement, il s’est rendu au cours avec sa fille, à la surprise générale des participantes !
Au fil des discussions, vendredi matin à la crèche, un souci d’égalité « dans les deux sens » émerge. « Les femmes se battent aussi pour le congé paternité, ainsi qu’en faveur de la possibilité, pour les hommes, de travailler à temps partiel », résume Evelyne Jelk. Et c’est ce que la petite demi-douzaine de collaboratrices de la garderie de Sainte-Croix qui ont défilé à Lausanne ont constaté. « Nous avons les mêmes préoccupations que dans les villes », souligne Jocelyne Besuchet qui relève « l’implication de plusieurs générations dans les cortèges, la participation de nombreux hommes, dans une belle ambiance générale ».
Des appréciations très contrastées
Alors qu’une déferlante de violet envahissait les places des grandes villes, et même de petites cités comme Le Sentier et Fleurier, Sainte-Croix est resté vierge de manifestation locale dans la rue vendredi. Quelques rares affiches signalaient la grève des femmes, les badges étaient tout aussi rares, sauf au Réseau Santé Balcon du Jura (RSBJ), où une partie du personnel a tenu à montrer sa solidarité avec la grève des femmes. « Le RSBJ s’est calqué sur les directives du canton qui a déclaré la grève licite », évoque le directeur Alain Periat. Les services se sont organisés pour assurer leur mission, et les personnes parties plus tôt pour manifester l’ont fait sur leurs heures libres. Seules deux ont sollicité et obtenu un congé.
À l’école, la grève des femmes semble être passée inaperçue. « Nous n’avons aucune information quant à ce qui a été mené lors de cette journée », répond Sarah Christe, doyenne de l’établissement primaire de Sainte-Croix et environs.
« Pas dans mes gènes »
Un rapide micro-trottoir dans les commerces et les rues montre qu’une partie de la population féminine sainte-crix ne se reconnaît pas dans les revendications des femmes et surtout dans le terme de « féministe », qui reste trop connoté à leurs yeux. « C’est se plaindre la bouche pleine », considère la restauratrice Eliane Divorne, favorable cependant à l’égalité des salaires. Dans sa boulangerie, Sylvie Jaccard estime que « cela va trop loin », et que les hommes ne trouvent plus leur place. Elisabeth Maillard est péremptoire : « il est plus important de travailler que de faire la grève ». Elle dénonce en revanche les difficultés financières des jeunes familles, des ménages avec un seul salaire ou des personnes âgées, qui peinent à boucler leurs fins de mois.
Certaines n’ont pas osé. « Je voudrais bien, mais je ne peux pas », exprime une ouvrière de la place, alors qu’une caissière d’une grande surface sourit sans répondre. De son côté, Sylvie Recordon déclare en riant : « Ce n’est pas dans mes gènes de faire la grève ».
Un coup de sonde par téléphone dans diverses entreprises montre qu’elles sont aussi restées éloignées du mouvement. Sauf au Zarti’ Cirque, où plusieurs jeunes filles se sont jointes aux manifestations.
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