La conseillère d’État Nuria Gorrite a coupé le ruban qui ouvre officiellement un chantier qui s’étalera sur quatre ans, au terme duquel les derniers kilomètres de la route de la Côte seront remodelés et sécurisés. Un vrai bonus pour les usagers à long terme, mais l’actuelle déviation du trafic, prévue sur huit mois, réduit la sécurité des riverains.
« Ce chantier, qui s’étendra sur quatre ans, est le plus ambitieux que nous lançons cette année. Avec un budget de plus de 35 millions de francs, nous allons sécuriser 3,7 km d’un axe vital, la RC 254 Vuiteboeuf-Sainte-Croix, et construire un tunnel de 180 mètres qui supprimera un passage dangereux. Nous allons aménager une voie de dépassement alternée pour réduire les ralentissements, sécuriser les parois rocheuses pour prévenir tout risque d’éboulement et rénover les ouvrages de soutènement pour assurer la pérennité des infrastructures » a résumé Nuria Gorrite, conseillère d’État, lors du premier coup de pioche symbolique du chantier, vendredi dernier à Sainte-Croix. Elle s’exprimait devant un parterre de quelque quatre-vingts invités, autorités locales, représentants de la DGMR et entreprises engagées dans le chantier qui a débuté officiellement le 10 mars dernier.
« Investir dans nos routes, particulièrement dans les régions de relief, est une nécessité impérieuse. Ces territoires sont en première ligne face aux effets du changement climatique : intempéries plus fréquentes, glissements de terrain, gel et dégel accélérés fragilisent les routes et les ouvrages », a plaidé en substance la cheffe du Département de la Culture.
Points d’attention
« Ce chantier n’est pas seulement une amélioration de notre infrastructure routière, c’est un atout essentiel pour le développement, l’attractivité et l’avenir économique et touristique de notre région », a salué Yvan Pahud, syndic de la commune de Sainte-Croix. Il y voit « une étape clé pour relier le haut et le bas du Balcon du Jura », et illustre son propos : « Bâtir des ponts crée des liens, mais en ce jour, les tunnels aussi ».
Syndique de Bullet, Maude Schreyer a remercié le « Conseil d’État et le Grand Conseil qui ont reconnu la nécessité de procéder à des travaux de sécurisation sur le tronçon qui relie le Balcon du Jura à la plaine, créant un lien entre les deux régions à l’instar de la ligne ferroviaire Yverdon-Sainte-Croix ». Elle a rappelé le rôle « historique » de la route de la Côte, utilisée depuis plusieurs siècles, avec un tracé un peu différent par le passé.
« Sa fonction n’a rien perdu de son importance aujourd’hui », a-t-elle assuré.
Entré dans une phase concrète, le chantier « s’accompagne de défis à relever et de points d’attention », a signalé la syndique de Bullet. Si « la réfection de la RC254 vise une sécurisation à long terme pour le trafic routier, les mesures de déviation mises en place à court terme engendrent, elles, un sentiment de désécurisation pour la population des localités traversées par le trafic ».
Maude Schreyer a relevé que les petites communes, comme Bullet, Mauborget ou Tévenon, n’ont « historiquement pas été pensées pour accueillir un trafic important – 6'800 véhicules par jour - dans leurs rues et ruelles étroites ». Dans certains cas, a-t-elle poursuivi, « les normes ne permettent pas de mettre en place des mesures de sécurisation pour les piétonnes et piétons de tous âges ». Depuis le 10 mars, la Municipalité et la commune de Bullet font face à des appels et des courriers de la population qui expriment sa crainte face au défilé de véhicules à travers le village dépourvu de trottoirs et où le bord de la chaussée frôle parfois les habitations. « Nous les comprenons d’autant mieux que plusieurs membres de la Municipalité habitent aux abords de la rue principale et vivent la même expérience », note Maude Schreyer.
La commune avait souhaité instaurer le 30 km/h en traversée de localité. La DGMR ne l’a pas admis. Et sa demande de modérations de trafic et d’un nouveau marquage jaune pour les piétons a attendu pendant plus d’un an dans les services du canton. Le feu vert est arrivé trop tard pour permettre les travaux avant l’entrée en vigueur de la déviation. La Municipalité espère maintenant pouvoir aller rapidement de l’avant avec des solutions visant une « sécurité optimale sur les traversées de localité. Nous comptons sur le plein soutien du canton de Vaud dans ces démarches », a avisé la syndique de Bullet.
« Passage obligé »
La conseillère d’ État Nuria Gorrite entend les préoccupations, mais parle de « passage obligé ». La géographie escarpée de la région impose « des phases de travaux complexes qui nécessitent la fermeture complète de la route sur plusieurs mois », rappelle-t-elle. Du 10 mars à fin octobre 2025, le trafic est dévié par Bullet (7 km suppl. environ). L’artère sera fermée de Vuiteboeuf à Sainte-Croix pendant neuf semaines en été, imposant un détournement de 15 km par Bullet-Mauborget, Villars-Burquin, etc. «Nous avons tout mis en œuvre pour limiter ces interruptions, dans la durée et l’impact, au strict nécessaire », assure la cheffe du Département. Le chantier est géré par tronçon, la circulation en alternance gérée par des feux.
De son côté, la commune de Sainte-Croix a pris des mesures, validées par le Canton, pour restreindre aux bordiers la circulation à Vers-chez-Jaccard et à La Villette. L’accès à la route du Col de l’Aiguillon vers Baulmes n’est pas autorisé depuis L’Auberson, ce qui n’est pas toujours respecté par une petite partie des 3'300 véhicules qui franchissent la frontière et des usagers locaux. « La gendarmerie a été rendue attentive à la situation », avise Yvan Pahud. Elle est habilitée à amender les contrevenants.
Les travaux d’excavation ont débuté
Le projet est entré dans sa phase concrète en février, avec de gros défrichages de part et d’autre de la RC 254, entre le Grand Contour et le Rocher. Sur les recommandations de l’inspecteur forestier, les bûcherons ont abattu un peu plus d’arbres que prévu initialement, certains spécimens présentant un danger pour les usagers de la route en raison de leur mauvais état, précise en substance Didier Kreis, chef de projet. Dès le 3 mars, le trafic a été réglé en alternance par un feu pour permettre la déviation de conduites d’eau et de gaz de la commune, en raison d’une modification de l’axe de la route, communique le chef de projet.
Depuis le 10 mars, les ouvriers spécialisés du Consortium JPF-Dénériaz-Gasser-Francioli SA ont commencé l’excavation des rochers en amont de la route dans le secteur du Rocher avec des machines à chenillettes. La roche est dégrappée par un godet ou un marteau piqueur, ou encore par minage selon sa dureté. En fonction de ses caractéristiques, le matériau excavé pourra être recyclé et réutilisé pour la construction ou la réhabilitation des murs de soutènement de la chaussée. Plusieurs usagers de la route se sont étonnés ces dernières semaines de l’envergure du chantier délimitée par les piquets marqués en rouge. Didier Kreis explique que toute la partie supérieure est affectée à l’intervention des engins de chantier.
La creuse du tunnel de 180 mètres de long, sous le lieu-dit Le Château, est agendée à l’automne 2025, précise le chef de projet. La portion de route libérée par le tunnel sous le Château sera rendue à la mobilité douce.
0