
Lampedusa et les drames en mer nous rappellent de manière hebdomadaire le flux massif de migrants en chemin vers l’Europe. Sainte-Croix et son Centre EVAM n’en sont pas épargnés. Le point de la situation avec Carine Foretia, Responsable EVAM du secteur Nord.
« Si nous offrons un accueil de qualité, le requérant d’asile ne va pas remettre en question l’autorité», rappelle Carine Foretia, responsable du Centre EVAM à Sainte-Croix. Cet accueil, elle arrive à l’assurer grâce à une équipe de collaborateurs expérimentés et un solide réseau de services et de prestataires communaux et régionaux (voir encadré). Ensemble ils prennent actuellement en charge 130 personnes, organisées en familles pour la plupart. Les requérants actuellement hébergés à Sainte-Croix ont majoritairement fui la guerre civile en Syrie et les persécutions relatives au régime de dictature en Erythrée.
Recherche active de
solutions d’hébergements
« Nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation d’urgence », souligne Carine Foretia. « Depuis le mois de juin, les arrivées des migrants ont plus que doublé. Nous en sommes à près de 200 nouvelles personnes qu’il faut loger chaque mois sur le Canton de Vaud. Nos structures sont surchargées et pas adaptées à des arrivées aussi massives et durables. » Dans la mesure du possible, les hommes célibataires sont provisoirement logés dans des abris de protection civile, dont un nouveau est opérationnel dès ce mois de septembre à Épalinges. EVAM travaille donc activement à des solutions d’hébergement afin de pallier l’urgence. Pour la structure de Sainte-Croix, cela signifie que le nombre de lits par pièce va fort probablement devoir être augmenté, tout en respectant les quotas. Il s’agit d’une mesure qui se prendra en commun, avec tous les partenaires tangibles.
Quant à la durée d’hébergement, la situation d’accueil à Sainte-Croix a évolué de manière significative au fil des dernières années: instauré au début pour accueillir les personnes en attente d’une réponse et/ou d’un logement pendant une durée de 6 à 12 semaines, le Centre EVAM se trouve aujourd’hui à héberger les requérants durant près d’un an. Procédures longues, situations géopolitiques instables dans les pays d’origine, marché du logement extrêmement tendu: les facteurs sont multiples pour expliquer ces délais d’attente considérables. La plupart des requérants d’asile à Sainte-Croix se trouve donc ici depuis un bout de temps déjà.
Attentes longues :
encadrer et garder le lien
Quel que soit le type d’hébergement trouvé provisoirement, le temps se fait long pour les migrants, aussi à Sainte-Croix. L’attente d’une décision quant à leur statut et la stagnation dans les procédures les obligent à faire du sur-place. Souvent les requérants se sentent abandonnés et inutiles; l’impatience les guette. La mission du personnel d’encadrement est alors de rester proche de ses pensionnaires. Les différents intervenants travaillent donc sans cesse à une relation de qualité, dans l’écoute et le respect mutuel. Le contact se soigne mieux à travers des activités: sortir, se divertir et collaborer à des projets régionaux permet aux requérants de se sentir valorisés et utiles. Un des objectifs des responsables du Centre est d’intégrer les personnes aux évènements locaux tels que le carnaval, le cirque ou les fêtes au cinéma. De même, l’équipe d’encadrement veille à créer un mélange entre les différentes ethnies au sein même d’EVAM afin de garder en éveil leur ouverture au contact.
Carine Foretia rappelle que «le contexte de l’asile est un contexte sensible. Heureusement que, au sein des requérants, nous rencontrons relativement peu de tensions. S’il y en a, elles sont principalement liées aux arrivées et aux départs. Parfois des conflits entre personnes peuvent surgir, comme dans tout climat de promiscuité. Les gens ont peu d’intimité et sont confrontés à leurs détresses et questionnements respectifs «, souligne-t-elle. « Dans la vie du Centre, il y a pour nous toujours plusieurs facteurs qui doivent jouer ensemble. C’est notre rôle d’en faire part au requérant, tout en prenant en considération son opinion et en le traitant d’égal à égal.» EVAM dessine finalement la vie en mini-société, avec ses exigences de cohabitation et ses valeurs essentielles.
Pour clore, la responsable se dit touchée par la patience et l’indulgence des voisins directs à la Rue de l’Industrie. Elle est consciente que les nombreuses familles et enfants, issus d’un contexte culturel fondamentalement différent, peuvent amener leur lot de bruit et d’inconfort. Puis Madame Foretia souhaite aussi remercier le personnel sur place: «Mes collègues font un travail remarquable. Et je tiens à souligner que la collaboration avec les autorités et les partenaires locaux est excellente ici. Le bon fonctionnement d’EVAM à Sainte-Croix est un exemple pour beaucoup d’autres centres dans le Canton.» De quoi encourager la population locale qui côtoie les requérants au quotidien: à l’école, en grande surface, dans les rues qui, ici, sont paisibles.
Texte et photo :
Simone Zurbrügg
EVAM Sainte-Croix
en chiffres et en faits
• Le canton de Vaud accueille 8 % des requérants suisses.
• Places d’accueil EVAM Sainte-Croix : 125 (actuellement 130)
• Taux d’occupation : 105%
• Durée de séjour : entre 8 et 12 mois
• Pays de provenance : Syrie, Érythrée, Somalie, Maghreb.
• L’équipe d’encadrement est composée de 3 assistants sociaux, 2 administratifs, 1 intendant, 2 enseignantes de français, du personnel de surveillance et du personnel soignant.
• Modules de cours obligatoires : français, alphabétisation, us et coutumes en Suisse, histoire, politique et système scolaire helvétique, règles et vie au Centre, aide et assistance dans la procédure d’asile.
• Réseau de travail important : policlinique médicale universitaire, centre de soins et de santé, gendarmerie, municipalité, écoles, transports bénévoles, groupe bénévoles gérant notamment le « café-contact » et le vestiaire, école de cirque...
État : août 2014
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