
C’est la surprise et la consternation, les échanges scolaires entre les deux localités, commencés en 1999, se termineront cette année. Mme Denise Wolfsberger ainsi que les enseignants et le directeur sont très déçus. La déception est aussi grande chez les parents et chez les élèves. Comment en est-on arrivé là ?
Carmen Ruf, Marco Lehner et Marc Scholl font partie des élèves de Walzenhausen qui séjournent actuellement à Sainte-Croix. Ils ont 15 et 16 ans. Ils habitent un village d’Appenzell qui compte 2000 habitants et se situe à sept cents mètres d’altitude. Pour leur part Carmen et Marco viennent sur le Balcon du Jura pour la troisième fois. C’est dire s’ils apprécient et connaissent bien la région. Ils s’amusent à parler des quelques différences entre les manières de travailler en classe. « Ici à Sainte-Croix on doit se lever quand le maître entre en classe et c’est plus sévère !!! ». A Walzenhausen, le matin est consacré aux branches fondamentales et l’après-midi aux cours à niveau. L’avantage dans cet échange, poursuit Carmen, c’est d’habiter chez nos correspondants. Entre jeunes, hors de la structure scolaire, on ose plus facilement s’exprimer. « Au début j’avais un peu peur de parler mais à la fin de la semaine, c’était plus facile. On a des activités en commun avec nos correspondants ici et ensuite ils viennent avec nous en Suisse alémanique ». Ça crée des liens. Pendant l’année, hors de l’organisation scolaire, les contacts perdurent. « On s’est écrit à peu près une fois par mois » dit l’un d’eux. L’été passé, je suis venu à Sainte-Croix et j’ai fait du camping dans la tente de mon correspondant. Plein de souvenirs jalonnent désormais leur vie.
On a appris à mieux se connaître
Moi, je serais intéressée à faire mon apprentissage de bureau en Suisse Romande répond Carmen quand on lui parle de son avenir. Et moi je m’intéresse à l’automation, pourquoi pas à Yverdon. Avec le temps il s’est créé un véritable réseau social entre les deux régions. Il n’y a pas longtemps plusieurs élèves de Sainte-Croix ont fait leurs études de baccalauréat en Suisse Alémanique, notamment à Engelberg et à Frauenfeld.
Cet échange entre les élèves de deux classes exige des déplacements qui se font par petits groupes, les uns allant de Sainte-Croix vers Walzenhausen, les autres en sens inverse. Ils ont lieu le mercredi. La semaine d’échange dure donc d’un mercredi à l’autre. Depuis1999, tout s’est très bien passé. Les élèves vont jusqu’à Saint-Gall en train et de là voyagent jusqu’à Yverdon, sans changer. On ne déplore aucun problème.
Un système qui roulait
Malheureusement pour des raisons qui lui sont propres une famille de Sainte-Croix s’est adressée au Département de la Formation et de la Jeunesse pour demander que ces adolescents soient accompagnés par « des personnes responsables », c’est-à-dire, non des parents mais des enseignants, du moment que c’est une activité scolaire. C’est ce que diverses personnes du corps enseignant ont fait cette année afin de sauver l’organisation qui était déjà mise en place. Mais le Département de la Formation et de la Jeunesse exige que désormais les élèves soient accompagnés par des enseignants. On se rend compte bien vite qu’il ne sera plus possible de maintenir cet accompagnement de Ste-Croix en Suisse alémanique et retour. Celui-ci mobilise chaque mercredi deux enseignants pendant deux mois. C’est une question de temps et de frais. Il a fallu renoncer à cet échange scolaire unique dans le canton
Quel gâchis !
Ainsi donc, au nom de l’exigence d’une sécurité poussée à l’extrême et d’une vision juridique stricte et étroite des relations de l’école avec ses différents intervenants, on vient d’anéantir 14 années d’une fructueuse collaboration entre deux régions et deux populations qui ne demandent qu’à mieux se connaître. L’accompagnement d’élèves pour des activités scolaires est une mesure qui ne se discute même pas pour de jeunes élèves se déplaçant en groupe classe. Mais ces adolescents qui dans deux ou trois ans seront majeurs, sont tout de même capables de traverser seuls notre pays en pleine confiance sur un parcours des plus sécurisés et en plein jour, C’est ce qui a eu lieu depuis 1999 jusqu’à cette année sans aucun problème.
Quel gâchis !
Texte et photo :
A. Mottier
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