Les longs week-ends de l’Ascension et de la Pentecôte ont vu revenir la clientèle des chalets d’alpage et buvettes du Balcon du Jura. Les tenanciers s’accommodent au mieux des dispositions restrictives liées au coronavirus. La Combaz a un nouvel exploitant.
« Nous avons changé de décor, et de climat », sourit Cyril Golay, nouvel exploitant du restaurant de la Combaz avec sa compagne Yolanda. Ce spécialiste du tartare, actif antérieurement au Café Romand et au Café de la Plaine à Yverdon, a ajouté son plat fétiche aux fameux beignets dont l’origine remonte à plusieurs générations de tenanciers. Et le succès est au rendez-vous. Samedi dernier à midi, malgré le temps maussade, la salle à manger faisait le plein dans la limite des places autorisées. Démarrer une nouvelle activité en période de distanciation sociale pour cause de pandémie ne contrarie pas le nouveau patron : « Cela nous permet de prendre plus tranquillement nos marques ». Dans cet établissement situé sur la route de la Combaz en direction de Couvet, ouvert désormais sept jours sur sept, le personnel est paré : deux personnes en cuisine et autant en salle en semaine, jusqu’à huit personnes en week-end lorsque les dernières restrictions seront levées.
Allégement demandé
Au Mont-de-Baulmes, autre chalet dédié à la tradition des beignets au fromage depuis une cinquantaine d’années, la patronne Fabienne Estoppey ne cache pas sa contrariété face aux mesures restrictives liées au COVID-19 : « Nous demandons à Gastro-Vaud de lever l’obligation des deux mètres de distance entre les tables », déclare-t-elle, en tirant un parallèle avec les allègements accordés, notamment par la réouverture des discothèques. « Les gens n’attendent que de pouvoir revenir manger les beignets », assure la patronne, qui estime la perte de chiffre d’affaires liée à une ouverture décalée en mai et aux mesures COVID-19 à 35 à 40 % par rapport à un mois de mai « normal ». « Nous avons ouvert avec 11 jours de retard et nous avons loupé la plus grosse journée, la Fête des Mères », déplore-t-elle. Dans ce contexte spécial, seules deux personnes ont été engagées, avec des extras en appui, précise Fabienne Estoppey. À noter que les mets et boissons sont désormais préparés dans trois espaces différents, afin qu’une seule personne soit active par local.
Au chalet du Mont-de-la-Mayaz, Daniel Ferreira Lima fait aussi ses comptes. La deuxième saison démarre doucement. À l’ouverture, il ne pouvait proposer que 24 places en intérieur au lieu de 60, la terrasse passant même de 70 à 20 places. Avec les assouplissements consentis par le Conseil fédéral, c’est maintenant respectivement 30 et 40 places qui sont disponibles. « Les samedis et dimanches, nous avons refusé du monde à midi et le soir », confie le restaurateur. L’endroit étant magique pour profiter du coucher du soleil, les clients aiment prendre l’apéro dehors et mangent ensuite à l’intérieur. Il en résulte une double opération de désinfection après leur passage. « C’est un peu plus de boulot », reconnaît Daniel Ferreira Lima, qui constate aussi un changement dans sa clientèle : « Les personnes âgées sont moins nombreuses. En revanche, la plupart des personnes qui sortent à nouveau au restaurant pensent être de retour en période normale, il faut parfois leur rappeler de se désinfecter les mains ». À sa carte éclectique, qui propose sept jours sur sept les plats traditionnels de chalet et des spécialités portugaises, il a ajouté des salades servies aussi bien avec des röstis qu’en sandwich. Autre atout : une cuisine non-stop.
Fermé cet été
Le chalet d’alpage du Sollier n’accueillera pas de clients cet été. Les soucis de santé du couple d’exploitants les ont contraints à renoncer à ouvrir. Si l’an dernier, leur fille avait pris les rênes de la buvette quatre jours par semaine, cette année, la jeune femme n’a pas réitéré, la difficulté de mettre en œuvre les mesures liées au COVID-19 dans le chalet typique a pesé dans sa décision. La fondue servie dans le pain, l’originalité très prisée de la famille Loeffel, sera absente des réjouissances gustatives ces prochains mois.
Au chalet du Mont-des-Cerfs, Béatrice et Christophe Seydoux, connus notamment pour leurs viandes servies sur ardoise, annoncent une « bonne fréquentation » pendant les dix derniers jours de mai, bien que des fêtes de famille prévues aient été repoussées à septembre. « On arrive juste à suivre », relève Christophe Seydoux, qui souligne qu’il a été parfois difficile de faire respecter la limite des quatre places par table. Quant au dortoir, il relève qu’il n’a pas encore été utilisé ce printemps, les groupes devant encore patienter pour se rassembler.
Spécialités de röstis
Aux fourneaux de la Grandsonnaz-Dessus, Sylvie Oberson et son mari Patrice entament leur septième été. Avec un changement, les génisses en estivage sont désormais surveillées par les nouveaux exploitants de la Grandsonnaz-Dessous, la famille Mayor. La cuisinière de métier a apporté sa touche personnelle à la carte des mets fromagers servis au chalet. Outre la mise en valeur des produits de l’alpage, elle prépare le Crouchti, une garniture de croûte au fromage (sans pain) servie sur un lit de röstis. Situé à 50 mètres de l’itinéraire du chemin des Crêtes, la Grandsonnaz-Dessus dispose aussi de deux chambres et d’un dortoir rustique.
Aux Preisettes, le patron Ulrich Bliggenstofer propose lui aussi à sa carte une spécialité, le rösti pizza. Comme d’autres établissements d’alpage, il a dû renoncer à la bonne moitié de ses places. « Mais il y a quand même du monde, et le jardin est grand », positive-t-il.
En ce qui concerne la fixation du loyer, les buvettes-restaurants d’alpage du Balcon du Jura connaissent deux régimes différents. Par exemple, pour les Mont-de-Baulmes et le Mont-de-la-Mayaz, leur propriétaire, la commune de Sainte-Croix, indexe le loyer sur le chiffre d’affaires, précise le syndic Cédric Roten. Une perte de recettes déplorée en mai sera donc prise en considération au moment du règlement du loyer. À la Combaz, propriété de la commune de Bonvillars, « c’est un loyer fixe qui est perçu », précise Daniel Rappo, municipal. « Son montant est différent de celui d’un établissement en ville d’Yverdon », poursuit le municipal. Aucun abattement n’a été prévu en raison de l’ouverture un peu décalée et des restrictions liées au COVID-19, « mais nous soutiendrons le tenancier en cas de souci », assure-t-il. À la Grandsonnaz-Dessus, le loyer fixe de la buvette est déterminé par la commission d’affermage, déclare Nathalie Gigandet, municipale à Grandson, commune propriétaire de l’alpage des Grandsonnaz.
La cuisine de la Casba en travaux
« Nous ne pourrons pas ouvrir au 1er juillet comme prévu », avisent Nicole et Roger Félix, propriétaires de la Casba, contraints de réaliser divers travaux de conformité aux normes en vigueur. L’ancienne cuisine a été démontée, et il est prévu que les entreprises de sanitaire et d’électricité interviennent avant la pose du nouvel agencement de cuisine, agendée du 22 au 26 juin 2020. « Nous avons sous-estimé les postes électricité et sanitaire. Cela nous obligera à travailler provisoirement avec une cuisinière électrique "de ménage", jusqu'à ce que nous ayons fait suffisamment de chiffre d’affaires pour pouvoir investir 10'000 francs supplémentaires dans un nouveau piano et une hotte de cuisine », avise le couple. L’utilisation des éléments de cuisine existants qui leur avaient été proposés n’a pas pu se concrétiser, « notre local étant trop exigu. Tout a dû être fait sur mesure, au centimètre près », détaille Roger Félix. Le couple a opté pour des matériaux imitation chêne et vieux sapin, « qui ont été acceptés par le chimiste cantonal », relève Roger Félix. Un deuxième évier va également être installé.
Pour mémoire, les propriétaires ont récolté 40'000 francs de dons lors d’un appel de soutien lancé via une plateforme de crowdfunding. Les travaux seront sans doute achevés pour le 1er juillet 2020, mais les tenanciers devront encore décrocher les autorisations nécessaires à la réouverture de la Casba.
Les mêmes horaires, à savoir les week-ends et les jours fériés, ainsi que les vacances scolaires, seront appliqués, « si la météo le permet », nuance le couple.