
Pour la troisième année consécutive, le forum économique organisé par la municipalité de Sainte-Croix a eu lieu jeudi 29 octobre au Grand Hôtel des Rasses. Les intervenants, Florence Germond, municipale à Lausanne, Pascal Broulis, conseiller d’État et Jacques de Watteville, secrétaire d’État aux questions financières internationales, ont présenté les défis économiques et quelques ébauches de solutions qui attendent la Suisse et notre région dans les prochaines années.
Initié par la Municipalité de Sainte-Croix, ce rendez-vous annuel a pour but final le développement économique de nos communes du Balcon du Jura. Divers intervenants, hauts fonctionnaires, entrepreneurs, personnalités politiques viennent traiter d’un sujet d’actualité et permettent ainsi aux invités, tous concernés de près ou de loin par le développement de la région, de débattre des questions actuelles, d’évoquer des pistes ou simplement de « résauter » le temps d’une soirée.
Ainsi, Florence Germond, Municipale à Lausanne, a commencé par expliquer quelles mesures de promotions économiques avaient été mise en place dans la capitale vaudoise. Même s’il est difficile de comparer les deux régions, notamment parce que 84% de l’activité économique est concentrée dans les communautés urbaines, la création de prix pour promouvoir l’esprit d’entreprise, les soutiens dans l’innovation technologique et le microcrédit sont des mesures qui sont transposables partout. Les grandes agglomérations souffrent aussi de la disparition des petits commerces dans les centres, à cause de loyers prohibitifs et de nouvelles habitudes de consommation (supermarchés, e-commerce).
Fiscalité des entreprises et mesures de soutien aux ménages
Pascal Broulis évoque ensuite la troisième réforme de la fiscalité des entreprises (RIE III) et de l’importance d’avoir des finances cantonales saines, vu le manque à gagner qu’elle va engendrer, estimé à 200 millions de francs annuellement. Le Conseil d’État entend accompagner cette réforme de mesures de soutien du pouvoir d’achat des ménages. A charge des employeurs, les allocations pour enfant passeront de 230 à 300 francs. 52 millions supplémentaires iront à l’accueil de jour des enfants (FAJE). La déduction pour prime d’assurance-maladie augmentera de 400 francs et un subside spécifique limitera la charge des primes à 10% du revenu déterminant. La réduction ciblée de l’impôt sur la valeur locative et un renforcement de la protection des travailleurs de la construction complètent le dispositif. A plein régime l’État consacrera 70 millions par an à l’ensemble de ces mesures et les entreprises 104 millions.
Au niveau de la promotion économique, il existe un fond de soutien à l’industrie de 17 millions sous forme de cautionnements, de prêts ou d’aides à fonds perdus. Le message de Pascal Broulis : « entrepreneurs, soyez audacieux et soumettez-nous vos projets ! ».
Abandon du secret bancaire et bilatérales
C’est au tour de Jacques de Watteville, secrétaire d’Etat aux questions financières internationales et négociateur en chef avec l’Union européenne, de faire part de ses craintes sur l’avenir des bilatérales. En effet celles-ci ont été mises à mal par le vote du 9 février 2014 mais pas seulement. Face aux pressions des USA et de l’OCDE pour l’échange automatique d’informations en matière fiscale, qui signifiait la fin du secret bancaire, nos banques ont mis les bâtons dans les roues lors des négociations avec l’UE. Dans les faits, les catastrophes redoutées n’ont pas eu lieu car malgré l’abandon du secret bancaire en 2008 la Suisse reste leader mondial en matière de gestion de fortune avec même une augmentation des fonds sous gestion. Ces mêmes banques poussent maintenant les négociateurs à mettre sous toit des accords d’accès aux marchés européens pour des prestations de services transfrontières, accords qui leur permettraient de démarcher la clientèle directement depuis la Suisse sans passer par des succursales à l’étranger. Quelques dossiers litigieux sont encore ouverts, tels que les retards de paiement réguliers de nos voisins français pour la rétrocession de la part des frontaliers et au Tessin des négociations quelque peu chaotiques sur l’imposition des frontaliers. Pour Jacques de Watteville la prospérité de la Suisse dépendra en grande partie de l’issue de ces dossiers avec l’UE.
Mais quid de Sainte-Croix dans tout ça?
Eric Hoesli, œuvrant comme modérateur pour l’occasion, pose alors une question quelque peu provocatrice aux trois intervenants ; malgré les efforts de la unicipalité pour attirer des entreprises, on a plus l’impression que ce qui augmente, ce sont les personnes à l’aide sociale et les requérants d’asile, alors que faire concrètement ? Pascal Broulis explique que le canton développe des projets ici également, tels que la construction d’un nouvel EMS ou l’extension de l’École technique, projets pourvoyeurs d’emplois. Malheureusement dans les deux cas des oppositions retardent l’avancement des travaux et contre cela l’État ne peut rien. Pour Jacques de Watteville, le destin de notre région frontalière est intimement lié au sauvetage des bilatérales car les réflexes protectionnistes n’apportent rien de bon en économie et, étant entourés par les pays de l’UE, qu’on le veuille ou non, il faudra construire notre avenir économique ensemble.
M. Guinet
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