Ils suscitent l’admiration des touristes et sont comme une présence amicale pour les habitués de la route entre Vuitebœuf et Sainte-Croix. Les chamois du Balcon du Jura se portent bien, assure le surveillant permanent de la faune.
Les populations de chamois sont en diminution dans tous les massifs alpins d’Europe, mais les hardes du Balcon du Jura sont en légère augmentation, confie Alain Seletto, surveillant permanent de la faune dans la région depuis 18 ans. Il corrobore les observations des habitués de la route Vuiteboeuf Sainte-Croix. Vingt à vingt-cinq de ces charmants caprinés au pelage brun foncé et aux petites cornes d’un noir ébène vivent dans la côte, en deux groupes fluctuants, ainsi qu’une trentaine près du hameau de La Villette, précise Alain Seletto.
De fin octobre à décembre, c’est l’effervescence dans ce petit monde à sabots : les mâles, solitaires en été, sont en rut. La crinière hérissée, ils n’ont que leur quête sexuelle en tête, et oublient leur vigilance par rapport aux prédateurs comme le lynx, bien que la prédation de ce dernier soit infime dans la région. « On croit toujours que le lynx mange les chevreaux, mais c’est faux », souligne Alain Seletto, les petits sont protégés par leur mère, alors que les mâles se font parfois prendre par manque de vigilance. Quant aux loups jurassiens, aucune carcasse de chamois n’a été identifiée comme victime du grand canidé.
Dérangements
Par de patientes observations sur le terrain, et aussi grâce à des pièges photographiques, le surveillant de la faune s’est fait une bonne idée des habitudes des chamois du Jura vaudois. Diurne, au contraire du chevreuil qui sort à la tombée de la nuit pour se nourrir, il fait son ordinaire de ce que lui offre la forêt : des plantes herbacées à la belle saison, des végétaux ligneux en hiver. Repu, l’animal se retire sur des surplombs ou des endroits peu accessibles, par sécurité.
Les petits conçus à cette période viendront au monde en mai, généralement la chèvre n’a qu’un seul chevreau. Plus de la moitié des jeunes ne parviendra pas à l’âge adulte. Ce n’est pas tant la couche de neige hivernale qui en est la cause, mais les dérangements. Avec le développement des activités de loisirs – raquettes à neige, ski de randonnée, mais aussi VTT et VTT électrique, les amoureux de la nature sauvage qui sortent des sentiers font fuir le gibier, et les dérangements répétés l’affaiblissent. C’est le cas particulièrement au Suchet, sur son flanc nord, et aux Aiguilles de Baulmes, où les adeptes de sports de nature sont beaucoup plus nombreux que par le passé, évoque le surveillant de la faune.
Friands de sel
Paradoxalement, les hardes de la côte de Sainte-Croix se sont habituées au trafic routier, confirme Alain Seletto. Mais il suffit que les véhicules ralentissent ou s’arrêtent pour que les bêtes se mettent en alerte, et s’éloignent de quelques dizaines de mètres. Il y a très peu d’accidents avec un chamois, un à trois par an sur la route de la côte, soit trois fois moins que les collisions avec un chevreuil ou un sanglier, selon le surveillant de la faune à qui il incombe de répertorier les accidents dans une banque de données. Ils se produisent le plus souvent en hiver, les chamois étant friands du sel répandu sur la chaussée.
Le surveillant de la faune s’inscrit en faux contre l’idée de nourrir les animaux de la forêt en hiver. Un râtelier ou une pierre à sel vont contribuer à propager des maladies, si l’une ou l’autre des bêtes est atteinte. Alain Seletto est rassurant : la harde est en bonne santé, et quasiment aucun cas de kératoconjonctivite n’a été constaté ces dernières années.
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