
© Tito Haarpaintner
Le 1er décembre, premier dimanche de l’Avent, trois feux ont brillé sur nos sommets pour rappeler la tradition de Crêt-Bérard, instituée en 1963.
Il y a toujours une part de surprise pour moi, dans chaque feu de l’Avent. Surprise de constater que le temps a filé à toute vitesse, nous voilà déjà dans le dernier mois de l’année. Toujours là trop vite, trop tôt. Surprise aussi des conditions climatiques qui ne se ressemblent pas d’une année à l’autre. Puis, surprise finalement de ce qu’un simple feu, si banal qu’il soit, fait avec moi, intérieurement.
Le départ a lieu à 16h30, sac à dos, des saucissons à cuire sous les braises, un thermos chaud, l’équipement de neige sous le bras. Le soleil brille encore, douceur inespérée d’une fin d’après-midi. Mon fils adolescent affiche la motivation des grands jours: devant lui la perspective de passer une soirée plus spirituelle que consolo-ludique... Thérèse Aubert et Sophie Mermod accueillent les paroissiens pour un culte jeunesse. L’assistance a une allure inhabituelle, en tenue de ski à l’église. Toutes les générations sont représentées et les visages se détendent au gré des chants et réflexions autour du thème de la lumière. Lors du jeu d’orgue final, un sentiment spécial me saisit, comme si cette musique n’était pas clôture d’un culte, mais ouverture sur autre chose. Attente d’une soirée à venir.
Éléments déchaînés
La nuit est tombée sur le village silencieux d’un dimanche soir. A la sortie du temple, chacun attrape une torche. Nous nous mettons en route. La neige crisse sous nos pieds. Les enfants bouclent notre petit cortège. Seuls nos flambeaux illuminent nos pas. Plus nous montons sur les hauteurs, plus le vent se lève. Enfant de la plaine, je me surprends encore et toujours à devoir apprivoiser les éléments de la montagne qui peuvent, en l’espace de quelques instants, changer du tout au tout.
Ambiance hivernale et presque hostile sur le flanc du Mont des Cerfs, à notre arrivée. Un vent glacial balaie les crêtes et tire dans les braises, tape avec violence dans nos visages rougis par le froid et l’effort. Capuchons, lampes frontales, une gourde chaude: un air de scoutisme flotte sur les jeunes. Tout le monde se serre proche du feu. Vent et flammes, les éléments se déchaînent. Beaucoup. Trop pour les familles avec les petits enfants qui ont déjà courageusement gravi la montagne. Leur retour à la maison se fait précipitamment. Nos chants entonnés les accompagnent, sont portés plus loin. Mélodies sobres de Taizé, paroles du cœur. Oui, nous allons vers Noël, je le saisis maintenant, là-haut dans le froid. Prise de conscience et humilité. Temps à part dans un quotidien effréné.
Un autre feu nous fait signe depuis le Cochet ; invisible, par contre, celui brillant au Chasseron. Quelques courageux de la montagne y ont monté le bois et installé le feu près des rochers, à l’abri du vent. Conditions extrêmes. De ces feux de l’Avent édition 2013, on aurait tendance à retenir le contexte seulement. On pourrait laisser les éléments de la nature prendre le dessus sur la raison de notre recueillement. On serait tenté de garder en nous la seule image du vent, du froid et du feu. Et finalement d’être amenés à oublier l’essentiel: la lumière. Venue dans le monde.
Simone Zurbrügg
Leave a Reply